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Saint Martin de Francs
L’église se situe à
l’opposé du château
plus au sud, elle-même sur un tertre. Entourée de son cimetière, son
plan est
simple : à nef unique rectangulaire, terminée par une abside
semi-circulaire voutée en cul-de-four. Un clocher mur surplombe la
façade,
décorée d’arcatures multiples. Une sacristie flanche le chevet au sud.
Cet
édifice fait l’objet d’un classement au titre des Monuments Historiques
depuis
le 1er décembre 1908.
Francs
est cité dans la liste de 1398 des
paroisses du diocèse. La
date de
l’église nous est ensuite connue grâce à deux inscriptions gravées. La
première
est toujours présente sur l’une des voussures du portail ouest et nous
donne la
date du 22 juin 1605 pour la pose de la première pierre. La seconde est
une
plaque de cuivre, trouvée dans l’épaisseur du mur, quand fut percée la
porte
d’accès entre l’abside et la sacristie. Elle a été perdue, mais son
texte est
reporté par André Godin dans sa "Notice
sur Francs, Saint-Cibard et Tayac". En 1606, le cardinal de
Sourdis
visite l’église de Francs, qu’il trouve «petite et
sans sacristie, avec d’autres défaultz marquez au procès-verbal
de la visite d’icelle». Une nouvelle visite eut lieu en 1617 et le
procès-verbal parle de l’église comme d’un bâtiment achevé. Le procès
verbal
établi en 1687 lors d’une visite de l’archiprêtré d’Entre-Dordogne par
l’archevêque de Bordeaux précise que le chœur est voûté et la nef
lambrissée. En 1728, les
églises Saint-Pierre de Salles et
Saint-Martin de Francs sont notées comme les annexes du prieuré-cure
Notre-Dame
de la Fayotte. Cette même
année, une nouvelle visite
épiscopale est organisée à Francs. Le procès-verbal nous reprécise bien
qu’il
s’agit d’une reconstruction du XVIIème siècle.
L’église a fait l’objet de nombreux débats au sein de la
Société Archéologique de Bordeaux à la fin du XIXème siècle et le début
du XXème siècle. En effet,
les avis diffèrent concernant la datation de
l’édifice. Pour Auguste Bontemps, l’église de Francs dans son ensemble
date de la première moitié du XIIème siècle. Elle fut démolie pierre
par pierre après le siège du château, situé tout contre, et
reconstruite sur l’emplacement qu’elle occupe aujourd’hui en 1605.
Jean-Auguste Brutails a combattu cette thèse. L’auteur avait déjà donné
une monographie sur cet édifice et déclarait : « Pris
dans son ensemble l’édifice est bien roman, par le parti décoratif ; ne
sont pas romane les contreforts de la nef au puissant relief. […]
L’idée générale de l’ornementation est romane. […] Sont roman le
clocher en pignon, l’arcature du 1er étage, l’idée de flanquer la porte
de deux fausses baies, les archivoltes en pointes en étoiles ».
A l’art gothique, ils auraient emprunté les profils des piédroits et
des voussures de la porte, le socle des piédroits. « Sont
d’inspiration classique les modillons et la moulure de la corniche, les
têtes de lions, les anges joufflus, les ossements en sautoir, les
cannelures de deux colonnes de la nef… ». Gabriel Loirette
concède à Bontemps que des pierres de l’ancienne église ont été
réemployées en grand nombre. Mais il refuse l’idée que l’église
actuelle soit une réédification pure et simple de la première église.
Nous sommes face ici à une pure reconstruction du XVIIème
siècle, dans un style roman réinterprété par l’âge classique. La
survivance des formes romanes dans la région n’est pas étonnante en
soit, au vu des nombreux modèles observables par les artistes. Mais
cette volonté de reconstruire « roman » n’est pas anodine. En effet, il
s’agit d’assoir une continuité du pouvoir des Grafreteau, installé
depuis le XVIème siècle à Francs. De plus, dans les temps troublés des
Guerres de Religion, y a-t-il eut certainement un besoin de se
rattacher au passé catholique glorieux, incarné par l’art roman en
Gironde.
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